L’émotion de l’enlèvement-assassinat du petit Bouba avec son corollaire de colère, d’instinct de mort, de révolte et de haine aveuglante passée, je ne me pardonnerai pas, pour être utile à ma société, de ne pas jeter le regard de la raison sur ce phénomène et pour ainsi dire, passer les faits au crible du criticisme de la rationalité.

Fin février 2018 un jeune homme enlève un enfant de quatre ans, l’assassine et dit-il, le vide de son sang pour les fins d’un rituel maraboutique supposé lui procurer la richesse, l’argent… Ce type d’événements n’est pas nouveau ici. Des gens sont retrouvés assassinés et leurs corps mutilés de certains organes supposés avoir des vertus exceptionnelles de puissance et/ou de richesse. Des individus dits “brouteurs” sont clairement identifiés dans nos quartiers comme ayant fait disparaître soit leurs petites amies ou des prostituées pour faire des rituels et devenir riches et puissants…. Les faits divers aussi macabres les uns que les autres foisonnent au quotidien.  Dans ce climat de violence canibalistique et kabbalistique où prospère un autre type de bouchers, surgit encore un nouveau genre de bandits qui eux, loin des rituels d’un autre âge, tailladent les populations à la machette pour faire main basse sur leurs biens. Eux, ils n’attendent aucun miracle  d’une quelconque divinité ou génie bienveillant;  ils sont pragmatiques. Mais le sang coule et coule.. Le seul dénominateur commun: l’ARGENT il faut coûte que coûte l’argent! Les escrocs et autres pillards des deniers publics sont devenus de banal gentilshommes…

Pourquoi cette soif effrénée d’argent? L’argent comme un impératif catégorique…

Simplement parce que notre société est malade, malade de corruption et de mercantilisme impudique. Tout y est en vente: le service public, de la signature du premier d’entre nous à celle du planton, les concours, les diplômes, les marchés, les fonctions et les fonctionnaires…. et donc si tout est à vendre, il faut bien de l’argent.

Dans un environnement où gagner de l’argent honnêtement devient difficile du fait de cette grisaille généralisée, les salariés peinent à joindre les deux bouts, les entrepreneurs se noient au profit des prête-noms et autres amis, les commerces sont détruits, les pauvres délogés et humiliés regrettant amèrement ipso facto d’être pauvres, l’argent se raréfie et partant la solidarité….

Pourquoi dans un tel climat de fatalisme et de désespoir les faiseurs de miracles ne prospéreraient pas? Quelle limite voulez-vous qu’un homme dont l’existence est en jeu ait? (Puisque pour exister il faut de l’argent).

Aujourd’hui seuls les riches ont droit de cité. Nous avons deux classes, les hyper riches et les pauvres. Ces derniers sont piétinés, humiliés et même interdit de liberté..

Qu’attendre d’une société ainsi nivelée? La violence, faire feu de tout bois pour basculer de l’autre côté…

Nous avons tous les mains entachées du sang de Bouba, nous avons créé une société infernale et folle.

Brahima YEO