Après les échanges de voeux avec les hommes des médias, le président de la République, Alassane Ouattara, a bien voulu se prêter aux questions des journalistes. A cette occasion, le premier des Ivoiriens s’est prononcé, sans faux fuyant, sur des questions d’actualité.

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Abel Doualy (Fraternité Matin : Nous sommes heureux de nous retrouver à cette rencontre où nous parlons de liberté de la presse, je veux parler de la liberté d’expression en Côte d’Ivoire. Il y a une situation que nous sommes en train de vivre, nous, journalistes, que nous trouvons un peu cocasse, c’est le limogeage de M. Tiburce Koffi après avoir exprimé une opinion. Quel commentaire faites-vous de cette situation?

Vous faites bien de poser ce problème. Nous devons faire la distinction entre la presse privée et la presse publique. Vous ne me croirez peut-être pas mais j’ai été informé de cette décision qui a été proposée par le ministre de la Culture au Premier ministre, entre les deux fêtes, alors que je me trouvais à Assinie en train de rédiger mon discours de fin d’année. Le ministre de la Culture aura l’occasion d’expliquer pourquoi cela a eu lieu. Mais j’ai trouvé que la décision était justifiée. On ne peut pas bénéficier des deniers publics pour faire son travail et en même temps avoir un travail de sape de ce que fait le gouvernement. Je considère que les ministres ont toute la liberté. la liberté que vous voulez pour les journalistes, moi aussi, je la donne à mes ministres.

Barthélémy Kouamé (Frat-Mat Mobile) : Dans votre discours de fin d’année, vous avez dit que vous attendez que la justice finisse son travail dans le cadre du procès de la crise post-électorale pour solder définitivement cette crise. Qu’est-ce qu’on doit entendre par là ?

Je pense que vous êtes journaliste, le message est clair. Moi, je n’aime voir personne en prison. Chacun doit faire son travail. Les juges, bien sûr, le font. Et il n’y avait pas d’exception. La Commission nationale d’enquête a dressé une liste de personnes, ces personnes seront convoquées devant les tribunaux, elles auront à répondre des actes qui leur sont reprochés. Quand on me parle de justice des vainqueurs et tout ça, mais qu’ils sachent qu’on ne peut pas juger tout le monde le même jour. Et vous savez qu’il y a des cas de flagrant délit ainsi de suite. Et tous les cas seront jugés. Une fois que nous avons les jugements, bien évidemment, le chef de l’Etat a un certain nombre de prérogatives en matière de grâce et d’amnistie à proposer à l’assemblée nationale. Et mon souhait serait qu’à moment donné, nous puissions sortir de tout ce qui a trait à cette crise post-électorale. Mais je ne prendrai aucune décision qui puisse interférer avec le bon fonctionnement de la Justice.

Georges Aboké (ancien directeur de la Rti) : (…) Le problème que je voulais poser ici, c’est celui de la réhabilitation de nombreux membres de notre corporation. (…) Nous sommes partis de la Rti dans des conditions que nous n’avons pas appréciées. Nous pensons que nous sommes encore, aujourd’hui, bons pour le service…

Vous avez été long pour demander quelque chose de très simple. Vous savez, sur ces questions de la réintégration des uns et des autres, ceux qui sont en liberté provisoire, cela a commencé. L’ancien Premier ministre, le recteur, Aké M’Gbo, a été réhabilité, les diplomates ont été réhabilités. Donc pourquoi pas ceux de la presse ?

Morine Griso (Rfi et le Monde) : Dans votre discours, vous avez parlé de la Cdvr qui a bénéficié d’un budget de 16 milliards Fcfa. Vous avez ensuite décidé que le fonds de soutien aux victimes soit de 10 milliards Fcfa. Je veux comprendre pourquoi les victimes bénéficient d’un budget moindre que celui de la Cdvr sachant qu’il y a beaucoup de personnes dans les commissions locales de la Cdvr qui se plaignent de n’avoir pas encore touché des arriérés de salaire?

La Cdvr a travaillé pendant trois (3) ans. Donc 16 milliards FCFA, ça fait un peu plus de 5 milliards FCFA par an. C’est ce que la structure a demandé. D’ailleurs, le budget était de 11 milliards FCFA, il est passé à 13, ensuite à 16 milliards FCFA. Et nous avons, avec l’aide de la communauté internationale, apporté le soutien nécessaire. Mais j’indique que c’est sur 3 ans. Alors les 10 milliards FCFA dont on parle, c’est ce qui est inscrit dans le budget 2015. Et l’indemnisation va se faire sur plusieurs années. Donc évidemment, tous les ans, nous ferons des dotations parce que l’indemnisation des victimes est quelque chose d’essentiel. D’abord pour des raisons humanitaires mais également pour des questions de réconciliation nationale. et j’ai d’ailleurs plaidé, quand j’ai reçu le corps diplomatique, que la communauté internationale également a plus contribué à ce fonds. Donc 10 milliards FCFA, c’est un minimum annuel. Ce qui est important, c’est de mettre en place les structures et nous espérons le faire dans le premier trimestre pour que l’indemnisation des victimes puisse démarrer de manière effective. C’est cela qui va soulager ces familles qui ont eu des victimes ou qui ont été elles-mêmes victimes. Je voudrais terminer en vous souhaitant une très bonne et heureuse année, une presse digne de la Côte d’Ivoire et des Ivoiriens surtout pour une année d’élection présidentielle.

Je vous remercie.

Source: Le Nouveau Réveil du mardi 13 janvier 2013.