Présidentielle ivoirienne : Le PDCI-RDA en quête de légitimité sans Cheick Tidjane Thiam / © Photo: Elisabeth Real for The Wall Street Journal

La démission de Tidjane Thiam de la présidence du PDCI-RDA, survenue à quelques mois de l’échéance présidentielle, marque un tournant décisif dans la vie du parti historique ivoirien. Entre crise de légitimité, flottement stratégique et pressions juridiques liées à la question de sa nationalité, cet épisode révèle les fragilités d’une opposition en quête de repères. Ce départ contraint impose au PDCI un sursaut : reconstruire sa cohérence interne et retrouver un leadership crédible pour espérer peser dans la bataille électorale de 2025. 

Après la démission de Tidjane Thiam : un parti en quête de cap et de cohérence

Par Simplice Ongui

Londres, le 12 mai 2025 – Le paysage politique ivoirien est de nouveau secoué. À la veille d’une réunion d’urgence du Bureau politique convoquée à Cocody, la démission de Tidjane Thiam de la présidence du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire – Rassemblement Démocratique Africain (PDCI-RDA) a été officiellement annoncée ce dimanche 11 mai. Ce départ, aussi spectaculaire qu’attendu par certains observateurs, intervient dans un contexte tendu, marqué par de fortes turbulences internes, des interrogations sur la nationalité de Thiam et une pression croissante à l’approche de l’élection présidentielle de 2025.

Une démission sur fond de crise identitaire et juridique

L’affaire Thiam a cristallisé les tensions depuis plusieurs semaines. Sa nationalité française, à laquelle il aurait renoncé trop tardivement pour satisfaire aux critères d’éligibilité à la présidentielle de la République de Côte d’Ivoire, a exposé au grand jour les failles de gouvernance au sein du parti septuagénaire et du dispositif de son Conseil juridique. Les critiques n’ont cessé de fuser, aussi bien dans la presse que dans les rangs militants, accusant la direction du PDCI d’avoir privilégié une figure médiatique au détriment d’une base légalement et moralement solide.

Sous pression, et face à l’imminence d’un rejet de sa candidature, Thiam a donc préféré prendre les devants. Cette décision, bien que saluée par certains cadres comme un « acte de responsabilité », laisse le parti dans un vide stratégique alarmant.

Le retour du Comité des Sages et la gestion intérimaire

Désormais présidé par intérim par Ernest N’Koumo Mobio, le PDCI-RDA se tourne vers ses instances traditionnelles, notamment le Comité des Sages, pour assurer la transition. La réunion du 12 mai, élargie à ces anciens piliers du parti, revêt une importance capitale : il s’agira de reconstruire une ligne politique claire, de restaurer l’unité, mais surtout de désigner une alternative crédible à la candidature vacante.

Des noms circulent déjà, mais la prudence est de mise. Car le principal enjeu n’est plus seulement électoral : il s’agit de rétablir la confiance dans une vieille formation politique ébranlée, minée par des querelles d’ambitions et une stratégie floue depuis la disparition d’Henri Konan Bédié. 

L’opposition ivoirienne à un tournant

La démission de Tidjane Thiam pourrait paradoxalement servir d’électrochoc. Le PDCI-RDA, fort de son ancrage historique et de son réseau militant, a encore la possibilité de jouer un rôle majeur dans le paysage politique ivoirien si la fibre ethnique est surpassée par les Akan ; et aussi, et surtout, à condition de réapprendre à écouter sa base, de clarifier ses positions, et surtout de rompre avec les calculs de façade. Le choix du futur président du parti – et potentiel candidat à la présidentielle – devra être fondé sur une vision et une légitimité indiscutables.

Pour finir, la crise actuelle rappelle une vérité simple : dans une démocratie en construction, la cohérence entre droit, morale et stratégie politique reste le fondement de toute ambition sérieuse. À défaut, le prix à payer est la désillusion des militants… et l’effritement de l’héritage.

Simplice Ongui
Directeur de Publication
Afriqu’Essor Magazine
osimgil@yahoo.co.uk