Ordination épiscopale de L’abbé Joseph Kacou Aka, 5e évêque du diocèse de Yamoussoukro, le 18 février 2023.

Dr. Jean Claude DJEREKE

L’abbé Joseph Kacou Aka, prêtre du diocèse de Grand-Bassam, a été ordonné évêque de Yamoussoukro, le 18 février 2023. Certains se sont demandé pourquoi le 5e évêque de la capitale politique ivoirienne a choisi comme consécrateur principal le cardinal Fridolin Ambongo, archevêque de Kinshasa (RDC) alors que les deux co-consécrateurs (Mgr Siméon Ahouanan Djro et Mgr Raymond Ahoua) sont ivoiriens.

D’abord, il est bon de savoir que c’est la personne nommée par le pape pour diriger tel ou tel diocèse qui choisit les évêques qui vont l’ordonner. Pourquoi le nouvel évêque a-t-il décidé d’être “consacré “ par Mgr Ambongo ? Peut-être pour affirmer la catholicité (universalité) de l’Église, pour signifier qu’il ne veut s’enfermer ni dans son pays, ni dans son ethnie.

Joseph Aka a été secrétaire de la Cerao qui regroupe tous les évêques francophones et anglophones de l’Afrique occidentale. Cette Cerao est une composante du Symposium des conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (Sceam) dont Mgr Ambongo a été le premier vice-président. Elle participe donc aux réunions du Sceam. On peut penser que c’est dans ce cadre qu’Aka a rencontré Ambongo.

La dernière raison pour laquelle Ambongo a été choisi, c’est son franc parler qu’il a en commun avec le cardinal Laurent Monsengwo qui l’a fait venir à Kinshasa et dont la déclaration du 2 janvier 2018 est restée dans toutes les mémoires congolaises : ” Il est temps que les médiocres dégagent et que règnent la paix et la justice en RDC.” Monsengwo s’adressait à Joseph Kabila qui voulait briguer un 3e mandat à la tête du pays. Une fois installé dans le fauteuil laissé vacant par Monsengwo, Ambongo ne tarda pas à parler crûment. C’est une voix critique contre les dérives et abus du pouvoir. Qohélet a beau conseiller qu’il y a un temps pour parler et un temps pour se taire, Ambongo n’est pas du genre à se taire longtemps ni à user de formules diplomatiques. Par exemple, en octobre 2022, il dénonça les pressions et la corruption ayant mené au choix de Denis Kadima comme président de la Commission électorale nationale indépendante. Peut-être Mgr Joseph Aka a-t-il été séduit par le prophétisme du cardinal congolais.

 

Pour avoir parlé vrai, haut et fort en 2013 comme les prophètes Osée, Amos, Jérémie, Ézéchiel et Jean Baptiste, pour avoir interpellé vivement Ouattara et Bédié dont le comportement, d’après lui, n’avait rien à voir avec la vision d’Houphouët, Mgr Marcellin Kouadio fut muté à Daloa comme si certains hommes politiques et certains “hommes de Dieu” avaient peur de dire et d’entendre la vérité.

Lors de sa prise de parole, Mgr Ambongo a rappelé qu’un évêque ne doit pas avoir peur de parler et de prendre position, qu’il est un prophète, qu’il doit jouer un rôle de veilleur et d’éveilleur des consciences. Mgr Joseph Aka sera-t-il ce prophète-là malgré les cadeaux que Dramane Ouattara et son gouvernement se sont empressés de lui offrir ? Sa bouche sera-t-elle “la bouche des malheurs qui n’ont point de bouche”(Aimé Césaire) ? Bref, Aka marchera-t-il sur les pas d’Ambongo ?

Dr. Jean Claude DJEREKE