« Aller au gouvernement, dans les conditions actuelles, sera contre-productif pour le Fpi »

N'Guessan Amani Michel

N’Guessan Amani Michel

(Le Nouveau Réveil, 30 mars 2013) – Dans cette deuxième partie de l’interview qu’il a bien voulu nous accorder, l’ex ministre de l’Education nationale et de la Défense sous Gbagbo, Michel Amani N’guessan, dit ce qui oppose fondamentalement son parti, le Fpi, au pouvoir Ouattara. 

Il y a quand même l’université qui a été entièrement réhabilitée.

L’université ? Je ne peux pas décrire la réalité, allez y voir et interroger étudiants et professeurs, ils vous diront la réalité. Les contre vérités que le gouvernement sert au peuple de Côte d’Ivoire finiront par le rattraper. Que de vaines publicités. Que de vains slogans!

Vous avez quand même fait dix (10) ans, le Fpi aurait pu faire mieux, mais les Ivoiriens n’ont absolument rien vu comme efforts pour améliorer les choses à l’université, a contrario du pouvoir.

Pour gouverner, il faut un ensemble de facteurs de base. Entre autres conditions, la paix et la cohésion sociales. Je crois que plus que jamais, M. Ouattara lui même est en train de comprendre que la paix est indispensable au développement. Quand chaque jour, il doit faire face à des problèmes à l’ouest, et que partout, en ville comme en campagne, c’est l’insécurité totale, la gouvernance devient difficile. Il comprend maintenant que dans ce contexte, il ne peut que chanter le développement. Il ne peut pas poser d’actes véritables en dehors des projets que Gbagbo a laissés. Ses projets nouveaux, nous les attendons. Pendant les dix (10) ans du Fpi au pouvoir, l’opposition d’alors ne lui a pas garanti la paix. Des coups d’Etat successifs ont donné lieu à une rébellion armée qui a occupé 60% du territoire ivoirien, suivies de pillages systématiques des ressources. Il y avait 2 caisses, une caisse gouvernementale et une autre tenue par la rébellion armée. C’est le lieu d’indiquer que Laurent Gbagbo n’a pas fait ça ni à Houphouët ni à Bédié ni à Guéi. Aujourd’hui, mon sieur Ouattara a tout le pays, avec l’unicité des caisses, les Ivoiriens sont en droit d’attendre un plus réel en lieu et place des slogans.

Alors, monsieur le ministre, qu’est ce qui vous oppose fondamentale ment, je veux dire le Fpi, à mon sieur Ouattara ?

C’est d’abord un problème idéologique. Monsieur Ouattara est libéral, nous ne croyons pas dans la privatisation comme moyen de développement économique. Ensuite, les voies pour accéder au pouvoir nous opposent. Alors que le Fpi prône la transition pacifique à la démocratie, le Rdr de monsieur Ouattara prône la force des armes comme moyen d’accession au pouvoir. Enfin, la nature du pouvoir. Alors que le Fpi aspire profondément à gouverner sur des bases démocratiques, monsieur Ouattara développe une dictature. Par ailleurs, prétextant de l’exclusion des populations du nord, il pratique le rattrapage. Nous disons oui à la géopolitique, mais non au régionalisme, à l’ethnicisme et au tribalisme. Ces dernières réalités sociologiques de la Côte d’Ivoire que sont la région, l’ethnie et la tribu, ajoutées au contexte de crise post électorale engagent la Côte d’Ivoire à privilégier le dialogue socio politique en vue d’obtenir la paix et la cohésion sociales si indispensables au développement. Or, M. Ouattara se croit dans une gouvernance sans contrainte.

Quelles sont les preuves que vous avez pour faire ces affirmations ?

Allons sur le terrain pour se convaincre que le rattrapage n’est pas resté un projet, mais est bel et bien traduit dans les faits. Prenons la liste des membres du gouvernement, des nominations dans la haute administration, le commandement dans l’armée, et tout devient non pas accusatoire mais réel.

Sous le président Laurent Gbagbo, on a constaté que certaines communautés ont souffert, ont même été exclues de la gestion des affaires publiques.

Lesquelles ? Assoyons nous et faisons deux tableaux comparatifs des nominations d’hier et celles d’aujourd’hui. La conclusion se tirera d’elle même. Au lieu d’une polémique de mauvais goût. Là encore, je répète qu’en Côte d’Ivoire, nous sommes obligés de faire de la géopolitique et non le régionalisme, l’ethnicisme et le tribalisme.

Le président de la République, par rapport à ce que vous dites, a appelé le Fpi à la table de négociations avec le Premier ministre Daniel Kablan Duncan. Vous n’êtes d’accord sur rien, alors de quoi avez vous parlé lors de ces différentes rencontres ?

On ne peut pas affirmer avant la fin de la discussion que nous ne sommes d’accord sur rien. On est politiquement opposés et les stratégies de développement sont différentes. Cette réalité existe dans tous les pays démocratiques. Cependant, les citoyens vivent en bonne intelligence, ensemble dans le respect des lois qui régissent le pays. C’est le premier accord du vivre ensemble dans un pays. Ensuite, en ce qui concerne la Côte d’Ivoire, après une crise comme celle que nous avons connue, il faut des accords de circonstance pour aller à la paix et à la réconciliation. C’est cette dernière donne que nous prenons en compte pour aller à la discussion avec le gouvernement.

Qu’est ce que vous dites alors à ce sujet ?

Résumons cela en quatre chapitres : 1/ la question sécuritaire, 2/ le jeu démocratique, 3/ l’Etat de Droit, 4/ la Réconciliation

La réconciliation des Ivoiriens est un devoir pour le gouvernement et une obligation pour tous ceux qui vivent en Côte d’Ivoire. Cette réconciliation passe par la normalisation de la vie politique qui dépend des quatre sujets ci dessus évoqués. C’est pourquoi, nous accordons une importance au dialogue républicain.

Vous avez demandé des gestes. Le président a répondu en libérant certains de vos camarades emprisonnés, notamment le Pr Aké N’gbo, en dégelant des avoirs. N’avez vous pas le sentiment de trop demander ?

Pour vous répondre, j’évoquerai les deux cas de figure qui se présentent à nous :

1/ Monsieur Ouattara donne d’une main et reprend deux ou trois fois de l’autre. Qu’est ce à dire ? Monsieur Ouattara libère deux partisans de Laurent Gbagbo et emprisonne quatre ou cinq. Les arrestations sont permanentes et les libérations rares.

2/ Les actes de décrispation devraient relever de la dynamique de la négociation. Mais que non. On a l’impression que les rares signaux de décrispation obéissent à d’autres objectifs que ceux de la négociation. Au total, la négociation n’a encore produit aucun effet. Bien au contraire, plus on discute, plus les arrestations continuent. Ce qui nous donne le sentiment de ne pas être écoutés et même d’être méprisés.

Sans vous demander de rentrer dans les détails, qu’est ce que vous demandez au président de la République, quels sont les problèmes que vous posez pour que la Côte d’Ivoire sorte de cette situation ?

Là dessus, nous sommes clairs. Nous avons déposé un mémorandum depuis septembre 2011 qui contient toutes nos préoccupations regroupées en quatre (4) chapitres ci dessus énumérés. Le problème sécuritaire : aujourd’hui, nous considérons que l’armée n’est pas nationale. Nous proposons une armée intégrée. Les accords politiques de Ouagadougou avaient fait des propositions. Et à l’époque, c’était M. Soro et M. Gbagbo qui s’étaient mis d’accord. Aujourd’hui, soit on rejette cet accord, alors il faut un nouveau consensus, un nouvel accord. Sans ce nouvel accord, M. Ouattara multiplie la création des forces. Sa dernière création est le Ccdo (Centre de coordination des décisions opérationnelles). Dans chacun des chapitres évoqués, nous avons plusieurs propositions claires et précises. Ici, nous avons insisté sur le chapitre sécurité.

Sous le président Gbagbo, on a connu le Cecos, y a t il un problème à créer le Ccdo?

Oui bien sûr. N’oublions pas que nous sortons d’une guerre qui a duré huit ans. Il a donc existé dans notre pays deux armées ennemies, les ex Fafn et les ex Fds. On n’efface pas la guerre dans l’esprit des hommes en un jour, même avec un décret présidentiel. A la suite de cette guerre, il faut se donner le temps et les moyens de créer une armée intégrée, une armée nationale. Aujourd’hui, M. Ouattara, n’étant pas signataire de l’Apo, le rejetterait il ? Si oui, allons donc à un nouvel accord. M. Ouattara, dans ce contexte de crise, ne peut pas procéder aux reformes qu’il entreprend et espérer avoir l’adhésion de tous. L’armée est un sujet sensible. C’est pourquoi, il faut la refonder sur la base d’un consensus national.

En dehors des questions sécuritaires, de quoi discutez vous avec le gouvernement ?

Nous discutons de trois autres sujets. Il s’agit du jeu démocratique. Un jeu a des règles qu’il faut définir au départ. Ainsi, on a admis tous en Côte d’Ivoire que l’arbitre des élections est la Cei. La Cei présente est celle exigée par l’opposition à l’époque sous M. Gbagbo. Pour obtenir la paix en Côte d’Ivoire et permettre une élection dans la confiance retrouvée, M. Laurent Gbagbo a accepté que la Cei soit dominée par l’opposition d’alors. Aujourd’hui, l’opposition d’hier est au pouvoir. Nous demandons une reforme pour rassurer l’opposition d’aujourd’hui. Par ailleurs, il faut la liberté des partis politiques de manifester. A ce niveau là, il n’y a rien de rassurant. On en est à l’interdiction des manifestations du Fpi. En outre, le découpage électoral doit se faire sur la base de critères partagés. Il s’agit aussi de l’Etat de droit. Les nombreuses arrestations et emprisonnements sans respecter les procédures, les tortures dans les camps militaires légaux et illégaux, la confiscation des biens meubles et immeubles de citoyens, le dégel des avoirs… sont des questions des droits de l’homme que nous examinons avec le gouvernement. Il s’agit, enfin, de la réconciliation. Il faut une loi d’amnistie générale pour ouvrir la page d’une nouvelle fraternité vraie entre les Ivoiriens, fondée sur la paix des cœurs et des esprits. Nous demandons aussi une rencontre au sommet entre Messieurs Ouattara et Gbagbo en vue de préparer tous les esprits à la paix et à la réconciliation. Comme vous le voyez, les préoccupations du Fpi ne sont tout de même pas de la mer à boire. Il suffit d’en discuter sérieuse ment avec la ferme volonté politique de sortir de la crise.

Le président du Fpi, Miaka Ouréto, annonce que le Fpi aura un candidat en 2015. Vous dites qu’il n’y a pas de sécurité, pas de respect des droits de l’homme, et vous allez à une élection en 2015 ?

Je vous ai dit que de la négociation se dégage une dynamique. Le Premier ministre nous a promis qu’au delà des élections locales du 21 avril 2013 qui vont avoir lieu, nous allons poursuivre les négociations. En disant que nous allons aux élections en 2015, c’est que nous avons foi que ces négociations là, un jour avant 2015, produiront des effets qui vont nous rassurer et nous permettre d’aller aux élections de 2015. On a 2013, 2014 à épuiser. 2015, c’est dans pratiquement 3 ans. Je pense que si on est sincère et qu’on aime la Côte d’Ivoire, on doit pouvoir avoir des accords nous permettant d’aller tranquillement aux élections en 2015. Il faut avouer que la question va au delà des élections. Il s’agit, en fait, de redéfinir de nouvelles clauses de fraternité en Côte d’Ivoire. Les élections ne seront alors que le couronnement d’une fraternité retrouvée.

Les Ivoiriens ont tous vu le Fpi gouverner. On a connu les escadrons de la mort, des gens ont été torturés, emprisonnés, ce ne sont pas des nouveaux faits.

Je vous laisse l’entière responsabilité de ce que vous dites. J’ai été ministre de la Défense sous Gbagbo. Démontrez moi que j’ai créé, de 2007 à 2010, des escadrons de la mort et autres. Souvent, on parle du régime de Gbagbo sans parler du contexte. Vous êtes chez vous à la maison et quelqu’un, comme un voleur, vient attaquer votre maisonnée. Qu’est ce que vous faites ? Vous le regardez, vous l’admirez, c’est cela ? M. Bédié me comprend mieux parce qu’il ne fait pas de discours sans rappeler 1999 (Rires). Vous êtes chez vous tranquille à la maison et on vient vous attaquer. Comme ça ! Où sont la légitimité et la légalité d’une rébellion ou d’un coup d’Etat ? Où était cette communauté internationale ? Qu’est ce qu’elle a fait ? Bien au contraire, c’est ce groupe de rebelles qui a été encadré et installé sur une partie du pays pendant huit ans avant de les porter au pouvoir dans une tragédie sans fin. L’occupation d’une partie du territoire a donné lieu à des pillages éhontés. Ailleurs, on demanderait des comptes sur l’origine des richesses. On parle de M. Gbagbo sans dire quel a été le contexte d’exécution du pouvoir de M. Gbagbo et quel est le nouveau contexte aujourd’hui. Cela permettrait de comprendre les différentes réactions à chaque période de gouvernance. M. Gbagbo, dès qu’il est arrivé au pouvoir en 2000, a organisé le Forum en 2001. C’est déjà un effort. Des Ivoiriens sont venus et M. Ouattara même était là. On a pensé que chacun avait été sincère. C’est le manque de sincérité des hommes politiques qui nous envoie de mal en pis.

Dont vous même parce que vous êtes homme politique.

Je suis homme politique aujourd’hui dans l’opposition. Les propositions que nous faisons sont des propositions objectives. Que l’on essaie d’appliquer ce que nous disons et on verra le résultat. Jamais un opposant n’a été aussi clair que nous le sommes avec les hommes au pouvoir. Quand ils étaient dans l’opposition, nous avons accepté, au nom de la Côte d’Ivoire, de créer avec eux des conditions politiques de la restauration de la paix. Ainsi, nous avons géré le pays ensemble. Passé récent qu’il refuse aujourd’hui d’assumer. Rejetant tout sur l’ancien président Laurent Gbagbo et le Fpi. 

Le président Ouattara a aussi sollicité le Fpi pour entrer dans le gouvernement ?

Aller au gouvernement dans les conditions actuelles sera contre productif à la fois pour le Fpi et pour la Côte d’Ivoire. C’est contre productif pour le Fpi, car entrer au gouvernement signifierait que nous mettons sous le boisseau toutes les valeurs socialistes aux quelles nous sommes attachés. En clair, accepterez vous d’aller à la chasse avec des frères et sœurs et les abandonner en brousse, tous en peine ? Non, nous ne le ferons pas. C’est contre productif pour la Côte d’Ivoire, parce que le gouvernement n’zassa n’est pas nouveau en Côte d’Ivoire et les résultats n’ont pas été probants. Aujourd’hui, inversons l’ordre des choses et mettons la recherche de la paix et la réconciliation en avant et le gouvernement après. La vie, c’est aussi la somme des expériences.

Le Fpi ne donne t il pas aujourd’hui dans la surenchère ?

Non, il n’y a pas de surenchère. Nous refusons de mourir idiots. La Côte d’Ivoire a connu des élections qui se sont terminées dans le sang parce que ces élections se sont déroulées dans de mauvaises conditions. Je peux l’affirmer parce qu’étant ministre de la Défense, j’avais à charge de créer les conditions sécuritaires, à savoir redéployer huit mille gendarmes et policiers sur l’ensemble du territoire national. Je n’ai pas pu le faire faute de moyens. A cela, il faut ajouter l’absence du désarmement des ex rebelles. On comprend alors ce qui est arrivé. Le Fpi ne veut plus ça en Côte d’Ivoire.

Et vous n’avez rien dit en son temps ?

Si, j’ai attiré l’attention des autorités sur l’impossibilité de redéployer les brigades mixtes de gendarmerie (Bmg) et les brigades mixtes de police (Bmp). La pression internationale était telle que tous ont fini par admettre que la situation était favorable aux élections. Aujourd’hui, je comprends mieux les choses. Il fallait obtenir le départ de M. Gbagbo du pouvoir, peu importe les conditions. Les élections n’étaient qu’un prétexte.

Vous étiez au pouvoir, vous avez constaté que ce volet important de la sécurisation des élections n’a pas été fait, et vous avez accepté d’aller aux élections. Ça parait tout de même incompréhensible.

Déjà en 2005, quand le président Gbagbo a dit que les conditions ne sont pas réunies pour aller aux élections, il a été juste toléré. Beaucoup de voix se sont élevées pour dire que Gbagbo ne veut pas partir du pouvoir. En 2010, il était difficile à M Gbagbo de s’opposer encore à cette coalition internationale dont le prolongement était M Ouattara qui disait de son côté que Gbagbo veut confisquer le pouvoir. Je vous ai dit tantôt que pour avoir souscrit à plusieurs statuts d’organisations internationales, il était difficile à M Gbagbo de résister à la pression extérieure coalisée avec la pression intérieure.

Comment voyez vous aujourd’hui la Côte d’Ivoire que dirige le Rhdp?

Ce n’est pas moi qui le dis, la Côte d’Ivoire va de mal en pis. C’est un constat. La Côte d’Ivoire est de plus en plus malade. Malade d’abord, au niveau de sa société qui est discriminée par le pouvoir en place. Des Ivoiriens ont l’impression qu’il y a de vrais Ivoiriens et de faux Ivoiriens. Des Ivoiriens qui sont à des postes qu’on démet à cause de leur région, ethnie ou religion. Il y a donc un problème social. Il y a en outre un problème économique grave. A côté des slogans des routes, des ponts et autres…, les Ivoiriens n’arrivent plus à se nourrir. La vie est chère. En somme, la société est malade, l’économie est malade. Le tout beigne dans une vie politique morose.

Le pouvoir a tout de même la latitude de gouverner avec ses hommes, ça a été le cas quand vous étiez au pouvoir tout de même ?

Quand tu gagnes les élections, tu gouvernes avec qui tu veux. Mais dans le contexte sociologique de la Côte d’Ivoire, il faut recourir à la géopolitique et non au régionalisme, à l’ethnicisme et au tribalisme ; à moins que le Rdr au pouvoir, en tant que parti, ne soit composé que des Ivoiriens d’une région et d’une religion spécifiques. Cette variété dans les nominations n’est pas très perceptible. L’Etat étant impersonnel, il faut veiller à ne pas détruire les fondamentaux de l’unité nationale. Je ne dis pas de nommer les militants du Fpi forcément. Mais il faut maintenir ceux qui sont déjà en poste, à moins qu’ils donnent la preuve d’une insubordination notoire. C’est facile de dire que de faire. Mais renseignez vous à l’Education nationale et au ministère de la Défense, et vous me rapporterez si je n’ai pas fait ce que je dis.

C’est bien ce qui se fait ?

Non, j’insiste et je vous demande de faire votre enquête en tant que journalistes et vous confirmerez ce que je vous dis. Tout porte à croire que le militant du Rdr est l’Ivoirien ressortissant du Nord.

Vous avez géré le département de l’Education nationale pendant plusieurs années, vous avez fait la même chose ?

Ah non, je n’ai pas fait ça. Bien au contraire, quand je suis arrivé, il fallait corriger les tares du Pdci à l’époque. Quand M. Ouattara est arrivé comme Premier ministre, il a raccroché les enseignants, introduisant ainsi une injustice salariale à l’Education nationale. Le président Gbagbo m’a demandé de normaliser très rapide ment cette situation. C’est ce que nous avons fait. On a donc remis les salaires à niveau. Ça, c’est le travail que le Fpi a fait. Mais mieux, les enseignants ont voulu un profil de carrière. C’est ce qui a été fait. Aujourd’hui, les enseignants nous le reconnaissent. Mieux, on a commencé à prendre en compte les effets financiers du profil de carrière. C’est aujourd’hui, l’objet de palabre entre M. Ouattara et les enseignants. Vous voyez bien que nous avons travaillé dans l’intérêt des enseignants.

Vous avez dit dans un organe de la place qu’il n’est pas à exclure que le Fpi puisse tendre la main au Pdci Rda. Assumez vous ces propos ?

Je l’assume. La Côte d’Ivoire est entrain de crouler sous nos yeux. Elle connait des difficultés graves. On ne va pas, au nom des idéologies, au nom des petits intérêts politiques, sacrifier notre pays. Je crois fermement qu’à un moment donné, tous ceux qui aiment la Côte d’Ivoire, les patriotes ivoiriens, vont se mettre ensemble pour sauver la mère patrie. Au delà du Pdci Rda, je pense à tous les patriotes de tous les partis politiques qui vont se rassembler dans une alliance nouvelle pour la République, y compris des militants du Rdr.

Qui, selon vous, sont les auteurs des attaques constatées ça et là dans le pays ?

Actuellement, je ne suis pas aux affaires. Vous m’avez trouvé ici à la maison. L’Etat a des moyens colossaux pour le savoir. Que l’Etat nous dise qui attaque au lieu d’accuser sans preuve les pro Gbagbo.

Vous avez été tout de même ministre de la Défense ?

Oui, mais, je n’ai aucun moyen aujourd’hui. J’avais les moyens de l’Etat.

Vous avez acheté beaucoup d’armes aussi, dit on.

C’est de la fabulation. Je mets  quiconque au défi de me prouver que j’ai acheté une seule arme de guerre. Dans le cadre de l’organisation des élections de 2010, il fallait redéployer huit mille gendarmes et policiers sur l’ensemble du territoire national. Nous n’avions pas d’armes légères pour cet important effectif à redéployer. C’est alors que j’ai introduit auprès du Conseil de sécurité via le comité des sanctions pour demander une dérogation, car la Côte d’Ivoire est sous embargo jusqu’à ce jour. J’ai eu une réponse favorable. J’ai donc envoyé une mission aux Usa pour acquérir quatre mille (4000) pistolets automatiques, 200.000 munitions 9mm et 50.000 gaz lacrymogène. Le tout une valeur de 1.800.000.000 F CFA. Contre toute attente, le colonel qui dirigeait la mission d’achat a été enlevé et emprisonné aux Usa. Il a été libéré et est rentré en Côte d’Ivoire à ma grande joie. Voilà pour ce que j’ai fait tout le temps que j’ai passé au ministère de la Défense.

Un homme totalement heureux, vous avez été longtemps au gouvernement. Amani N’Guessan est il un homme riche aujourd’hui ?

Par la grâce de Dieu, je ne mendie pas pour vivre. Je remercie le Seigneur qui pourvoie chaque jour à mes besoins pour mon existence et celle de ma famille sur la terre des hommes. 

Interview réalisée par Patrice Yao et Paul Koffi

Coll : Lance Touré, François Konan et Serge Amani