L’activité d’un syndicat consiste à prendre en compte l’intérêt général d’une collectivité donnée en vue de corriger des dysfonctionnements, des inégalités et des injustices, de négocier l’obtention d’une amélioration des conditions de vie et de travail, et non pas de mener des actions individuelles sur le plan syndical, parce que subordonnées à des ambitions personnelles et des intérêts politiques extérieurs à la collectivité qu’on prétend défendre (monde du travail ou vie estudiantine), pour les imposer par la suite, à cette même collectivité, au besoin à la machette, à tout le moins par des moyens violents, et à la société toute entière, y compris contre les intérêts de ces dernières. C’est ainsi, que nous avons réussi à détruire l’école ivoirienne et continuons de la démolir avec la complicité passive de l’État (absence de volonté politique forte, défaillance inadmissible d’un service public prioritaire depuis de longues années). C’est la tare ou la perversion de ce type de syndicalisme que je dénonce ici avec force.

Aussi, l’association des anciens de la FESCI n’a pas qualité pour s’exprimer au nom d’un syndicat qui continue d’exister et qui a une représentation légale pour le faire lui-même, car l’entité morale dont il est question, subsiste et demeure toujours la même sans que l’on ne puisse opérer de distinction de périodes ou de dirigeants. C’est une continuité juridique formant un tout indissociable, intégré et global, et non une agrégation de personnalités distinctes. De la même façon, Il ne peut avoir de superposition ou de concurrence déguisée, sans déroger aux dispositions légales qui donnent monopole et compétence aux syndicats d’étudiants, de représenter la population estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire. Les actions posées par leurs anciens dirigeants ont été engagées au nom de ces syndicats et non à titre personnel. Dès lors, seul les syndicats concernés, dont la FESCI, peuvent collectivement se remettre en cause et demander pardon pour ses actions passées, et non pas à des individus, à des personnalités politiques, mais à la collectivité estudiantine et à la Nation, à qui appartient l’école ivoirienne et la République qui a été combattue pour des motifs démocratiques légitimes. Il ne s’agit pas d’un conflit interpersonnel qui aurait fait naître des ressentiments entre un individu, qui a été un organe incarnant l’État, et une section du peuple, comme d’une affaire individuelle, mais de l’histoire des contradictions qui se sont opposées dans la construction d’un état démocratique. C’est consacrer un changement radical sur le plan de l’idéologie, de la méthode et de la vision de la FESCI. Ceci relève de la responsabilité des actuels dirigeants de ce syndicat et non de ses anciens dirigeants.

Dès lors, la démarche de l’ANA-FESCI est incompréhensible au regard du statut apolitique de cette association, en tant qu’amicale des anciens d’une structure donnée visant la fraternité, la solidarité sociale de ses membres. En sortant de ce périmètre, elle s’avère contraire à la logique juridique, et contredit à postériori l’esprit de neutralité qui devait animer le syndicat qu’ils ont représenté à un moment donné de son histoire. L’aveu postérieur de cette inféodation politique ne surprend guère les esprits avertis et les observateurs, mais c’est le caractère personnel des modalités de la caporalisation syndicale qui choque encore. Sous couvert de cette nouvelle structure, il s’agit en réalité de l’instrumentalisation et du prolongement politiques d’un syndicat par des anciens syndicalistes qui n’en méritaient pas du tout le nom. Peut-être attachés aux bénéfices qu’ils en tiraient à titre personnel et politique, ils souhaitent continuer à diriger en réalité une officine destinée à assurer exclusivement la représentation d’une école de pensée pour la monnayer auprès de différentes chapelles politiques, contre la promotion d’ambitions personnelles en construisant un outil politique avec le label de la FESCI comme produit d’appel, en vue d’assurer une base sociale à un groupement ou d’une personnalité politique. Il serait malsain de ma part, de douter de la sincérité de l’objectif de réconciliation poursuivi, mais il est une évidence, les éléments constitutifs de la démarche posent de nombreux problèmes.

En effet, c’est une perversion, pire que la précédente par son caractère opportuniste, qui réédite une démarche antérieure menée vis à vis du Général GUEI, alors qu’il venait de prendre le pouvoir (Cf. le témoignage de certains sachants de cette génération, dont le Dr. DOUMBIA Major). Le Président BÉDIÉ ne s’y est pas d’ailleurs totalement trompé. Premièrement en datant la création de la structure qui les regroupe tous aujourd’hui, à plus de sept ans, deuxièmement en précisant l’objet de la démarche qui guide cette organisation ” …le pardon que vous demandez pour tous les actes de jeunesse que vous avez posés tout au long de l’existence de la FESCI…”, alors que ce syndicat continue d’exister et est représenté. On ne pourrait mieux faire dans l’art de la confusion. Pierre Aly SOUMAREY