Par Mesloub Khider

La Suède, à l’inverse de l’ensemble des pays européens, fait figure d’exception en Europe où elle est l’un des rares pays à n’avoir imposé aucun confinement ou fermeture de commerces. En effet, la Suède n’a pas fait le choix de confiner sa population. Elle n’a pas opté pour la politique de confinement pour tenter d’endiguer l’épidémie du coronavirus. En conformité avec la tradition de respect des libertés individuelles du pays, en s’appuyant sur la «responsabilité des citoyens», les autorités suédoises, pour lutter contre le Covid-19, ont fait le choix de miser sur l’immunité collective progressive, réputée comme seule stratégie vraiment efficace à moyen terme en l’absence de vaccin.

Ainsi, là où d’autres pays européens ont eu recours à l’armée pour faire respecter les restrictions, les autorités suédoises ont misé sur la responsabilité individuelle, sur la collaboration de classe en fait.

La stratégie choisie par le gouvernement suédois a consisté à faire confiance aux habitants pour respecter les recommandations sanitaires de distanciation physique  et de gestes barrières (invitation des personnes de plus de 70 ans et celles jugées “à risque” de ne pas sortir, et des actifs de procéder, dans la mesure du possible, à du télétravail), assorties de quelques mesures restrictives relatives au rassemblement collectif (interdictions des événements de plus de 50 personnes, fermeture des lycées et des universités mais avec maintien des cours assurés à distance, proscription des visites dans les maisons de retraite). Le gouvernement suédois n’a procédé à aucune fermeture des écoles, ni des restaurants, ni des frontières. Du monde sur les terrasses de café, des enfants à l’école et des magasins ouverts : la vie n’a globalement pas changé ces derniers mois à Stockholm.

De manière générale, cette stratégie est vantée pour sa qualité sociale d’organisation de la vie de la population par l’aplanissement des risques liés au virus, sans pour autant interrompre le fonctionnement de l’économie. Le système médical s’est également adapté. En plus des campagnes de dépistage systématique, le pays a doublé ses lits en soins intensifs afin d’affronter efficacement l’afflux de malades. La population suédoise, convaincue de l’efficacité de la gestion sanitaire adoptée par son gouvernement, adhère majoritairement à cette stratégie d’immunité collective (selon les derniers sondages, 63% de la population fait confiance à ses dirigeants pour gérer la crise du Covid-19, 20% de plus qu’au début de l’épidémie).

Cependant, d’un point de vue de classe, cette adhésion s’explique par l’absence de tensions sociales, très prononcées dans les autres pays capitalistes. En vérité, la stratégie adoptée en Suède repose sur la collaboration de classes. Aussi, nul besoin d’adopter une politique répressive étatique pour obtenir le consentement de la petite-bourgeoisie suédoise à la gestion souple de la crise sanitaire du Covid-19. Une telle gestion sanitaire « démocratique », respectueuse des libertés individuelles, n’aurait aucune efficacité dans un pays comme la France déchirée par de graves tensions sociales, illustrées, ces dernières années, par les révoltes subversives portées par la petite-bourgeoisie paupérisée de plus en plus radicalisée. Ni en Italie à l’économie en pleine déconfiture, prompte à s’enflammer à la moindre remise en cause de ses droits. Ni en Algérie, pays pauvre en proie à des soulèvements populaires depuis plus d’un an. Ni en Inde, pays patchwork misérable et indiscipliné. Seule l’imposition du confinement totalitaire pouvait contraindre la population à se soumettre à la gestion despotique de la crise sanitaire du Covid-19.

C’est ce que confirme la directrice de recherche au CNRS et spécialiste de la Suède, Jenny Andersson, auprès de France Culture. Elle a souligné que la Suède compte un très grand nombre de “cols blancs”. Ces salariés, ces petits-bourgeois, “sont des gens qui peuvent travailler chez eux sans problème et qui ont tout de suite compris que c’était une bonne idée d’éviter les transports publics. Mais aussi, ils ont les moyens de ne pas se rendre au travail”, a-t-elle précisé. Cela explique également la surreprésentation des personnes immigrées dans les hôpitaux. Actuellement, les immigrés travaillent dans des emplois fortement exposés au risque de contagion lié au Covid-19, notamment dans la vente et les secteurs de service.

Résultat : dans ce pays de plus de 10 millions d’habitants où les restaurants et les bars sont restés ouverts, l’épidémie a fait, à la date du 5 mai, 2800 décès, dont plus de la moitié est décédée dans les maisons de retraite. Autrement dit, le virus n’a nullement sévi parmi l’immense majorité de la population suédoise (jeune et moins jeune) autorisée à circuler librement durant toute la période de la pandémie. En d’autres termes, en dépit de l’absence de confinement, le virus n’a pas tué les populations suédoises non confinées. Cela confirme les critiques formulées par Éric Raoult en France et Stefano Montanari en Italie contre le traitement spécieux de la crise sanitaire du Covid-19. Une autre célèbre médecin, le Docteur Nicole Delépine, s’est commise récemment d’un long texte pour dénoncer l’imposture du Covid-19. En effet, dans une tribune intitulée « Sortons de l’hystérie, l’épidémie est terminée!», publiée sur son site, l’auteure de La face cachée des médicaments a fustigé le «confinement aveugle», estimant que le confinement n’a absolument pas permis de faire baisser le nombre de décès.

Certes, en Suède, cette stratégie alternative au confinement a été critiquée par certains experts, mais l’objectif fixé d’atteindre l’immunité collective dès le mois de mai 2020 ayant été réalisé, cela prouve ainsi l’efficacité de cette stratégie sanitaire fondée sur l’adhésion volontaire des habitants suédois et non sur des mesures coercitives.

L’immunité collective a souvent été énoncée comme le procédé efficace pour circonscrire une épidémie, en l’absence (ou en l’attente) de vaccin. Selon les spécialistes, étant donné les caractéristiques connues du Sars-Cov2, l’immunité collective serait atteinte une fois les deux tiers d’une population seraient infectés. Théoriquement, les habitants d’un pays, survivant à la maladie, développeraient des anticorps, dès lors ils seraient considérés comme désormais immunisés. Faute de personnes à contaminer, le virus ralentirait considérablement sa propagation et finirait par disparaître. Sur le fondement de ces données médicales, la Suède semble avoir emprunté la bonne voie pour atteindre la phase de l’immunité collective.

Dans une déclaration du 26 avril, rapportée par le journal Libération datée du 5 mai 2020, l’ambassadrice de Suède aux États-Unis, Karin Ulrika Olofsdotter, a indiqué à la radio américaine NPR : «Environ 30% des gens à Stockholm ont atteint un niveau d’immunité. Nous pourrions atteindre l’immunité collective dans la capitale dès le mois prochain

Le pronostic d’une immunité collective acquise dès le mois de mai est également défendu par l’épidémiologiste suédois Johan Giesecke, qui a déclaré : «Nous pensons que nous devrions atteindre ce niveau d’ici la fin du mois de mai pour la région de Stockholm, le reste du pays a un peu de retard». Toujours selon le journal Libération, un professeur de mathématiques suédois, Tom Britton, spécialiste en modélisation des maladies infectieuses, a abouti à la même prédiction d’une imminente immunité collective fixée pour la fin du mois de mai 2020. En outre, Tom Britton précise que dans les pays voisins, ayant appliqué des mesures de confinement, la part de la population infectée ne serait que d’environ 20%. En comparaison, en France, une étude de l’Institut Pasteur a estimé qu’à la date du déconfinement, le 11 mai,  moins de 6% de la population française était en contact avec le virus, ce taux variant fortement selon les régions.

Certes, comparativement à ses voisins scandinaves ayant opté pour le confinement, la Suède a enregistré un nombre de décès élevé. En effet, le nombre de morts liés au Covid-19 est largement inférieur dans ces pays nordiques : 550 décès au Danemark, 300 en Finlande et 235 en Norvège. Mais c’est largement moins que dans de nombreux pays européens, notamment la France, l’Italie, l’Espagne, ayant pourtant instauré un confinement total.

À cet égard, les autorités suédoises ont reconnu avoir subi une mortalité supérieure à celle de ses voisins. Elles ont imputé la responsabilité de cette surmortalité à des échecs dans la gestion des centres de soin pour personnes âgées, où le virus a pu se propager malgré les recommandations d’interdiction des visites dans ces centres. «Le taux de mortalité élevé que nous pouvons constater en Suède est très étroitement lié à nos maisons de retraite en Suède. C’est beaucoup moins le cas en Norvège et en Finlande», a expliqué Anders Tegnell au journal The Australian, information rapportée par le journal Libération daté du 5 mai. Il ne faut pas oublier que les pays européens, en particulier la France, l’Italie et l’Espagne, en dépit de leur politique de confinement généralisé, ont enregistré également une mortalité très élevée dans leurs maisons de retraite, pourtant censément mises en quarantaine.

Quoi qu’il en soit, devant la gravité de l’épidémie du Covid-19, la Suède a démontré que la stratégie de l’immunité collective adoptée, dépourvue de mesures coercitives notamment le confinement, a prouvé son efficacité, aussi bien au plan sanitaire qu’économique. Une chose est sûre : au niveau économique, la Suède a moins été pénalisée que les pays européens, notamment la France. L’effondrement économique attendu sera plus dramatique dans les pays européens. La Suède, face à l’épidémie du coronavirus, a appliqué le principe d’Hippocrate : «d’abord ne pas nuire» à l’économie, garante d’une meilleure santé de la population. Car une économie en ruine, c’est la multiplication des chômeurs, des dépressions, des suicides, des violences intrafamiliales, de la faiblesse économique, de la dégradation du système de santé déjà défaillant, mais aussi des moyens en moins pour la recherche médicale. En tout état de cause, les dévastations occasionnées par le confinement sont plus coûteux que les quelques années de vie sauvées pour les personnes infectées (plus de la moitié des personnes décédées ont plus de 80 ans, l’espérance de vie est de 80 ans pour les hommes, 85 ans pour les femmes.)

Au final, du fait de l’adoption de la stratégie de confinement, les pays européens auront sacrifié, et leurs personnes âgées, et leurs populations actives jeunes privées maintenant d’avenir économique détruite par l’inconséquence criminelle gouvernementale. Aujourd’hui, pour prendre l’exemple de la France à l’économie dynamitée par le confinement, selon les dernières données, sur les 47 millions de Français âgés de plus de 18 ans, 34 millions dépendent désormais directement de l’État pour leurs revenus.

Au reste, d’un point de vue médical, la stratégie de la Suède aurait un autre impact favorable. En dépit des critiques formulées par certains experts, l’approche suédoise de l’immunité collective présente en effet un avantage médical évident. Cette approche, du fait de l’immunité collective obtenue, permettrait de contrer une deuxième ou troisième vague de l’épidémie du coronavirus. En revanche, dans l’hypothèse d’une deuxième vague de la pandémie, le risque est grand pour les pays ayant opté pour le confinement, dépourvus donc d’immunité collective. Cela va entraîner de nouvelles restrictions toujours plus préjudiciables pour l’économie et surtout de nouveaux décès par milliers.

La Suède a misé sur le respect des libertés individuelles et la responsabilité des citoyens pour gérer la crise sanitaire du Covid-19. Mais le refus du confinement autoritaire ne signifie pas le rejet du confinement partiel volontaire appliqué aux personnes âgées et les malades fragiles. La Suède, grâce à la collaboration de classes obtenue aisément, par le rejet de la politique de confinement arbitraire, a permis d’éviter les dérives despotiques observées dans l’ensemble des pays du monde. Au plan économique, selon les analystes, contrairement aux pays européens, les finances publiques de la Suède se portent bien. Aussi, la crise économique mondiale aura moins d’impact sur le pays. De surcroît, la Suède, ne faisant pas partie de la zone euro, pourrait dévaluer sa devise dans l’éventualité d’une mauvaise conjoncture économique. 

Mesloub Khider

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