Quand on redemande un certificat de nationalité pendant qu’on se fait réélire, c’est qu’il y a un sérieux bug dans la République.

Le PDCI a parlé : Thiam reste président. Les textes, eux, restent sous le tapis.
Il faut croire que le ridicule n’a jamais empêché personne de se faire élire. Deux jours à peine après une démission fracassante, Cheick Tidjane Thiam est réélu à la tête du PDCI-RDA dans une ambiance du 9ème Congrès extraordinaire express, au timing aussi serré qu’un déguisement mal taillé. Rideau levé, applaudissements polis, suspense zéro. Le “recul stratégique” a tenu 48 heures. À croire que même la scène avait été répétée.
Mais le plus fascinant dans cette affaire, ce n’est pas tant la réélection — qui, soyons honnêtes, tenait plus du plébiscite mis en scène que du choix démocratique — que le silence assourdissant autour de la pièce manquante du puzzle : le certificat de nationalité. Ce même 14 mai, pendant qu’on acclame le “nouveau président”, on apprend que Cheick Tidjane Thiam, le champion du jour, vient tout juste de redemander un certificat de nationalité ivoirienne. Oui, vous avez bien lu : redemander…
Alors on s’interroge :
1 – Le dossier de sa candidature à ce 9ème Congrès extraordinaire contenait-il ou non ce document ?
2 – Et si non, pourquoi s’être précipité ? Pour donner un peu plus de tension à un film déjà cousu de fil blanc ?
Ajoutez à cela une absence militante de plus de vingt ans, un passage éclair au Bureau politique (en tout cas bien en deçà des 10 ans requis), et vous avez là un cocktail parfait d’ambiguïtés, de contorsions statutaires et d’enthousiasme feint. Mais au pays des partis de notables, le prestige efface l’absence, l’ethnie et l’argent font souvent office de mémoire militante.
Soyons clairs : ce congrès n’a rien réglé. Il a tout juste déplacé le problème. La base reste divisée, les textes restent bafoués, et la défiance s’installe dans le regard de ceux qui ont encore un peu de mémoire et beaucoup de bon sens. D’ailleurs, il suffirait d’un procès — pour inscription frauduleuse sur la liste électorale par exemple — et d’une peine symbolique de dix mois avec sursis pour griller la carte Thiam comme un vieux bulletin de vote mal plié. Le pouvoir ne s’en privera peut-être pas. On appelle ça tendre le bâton pour se faire battre.
En somme, ce feuilleton ne connaît ni fin, ni rebondissement digne de ce nom. Il tourne en boucle sur lui-même, comme ces vieux vinyles rayés qui répètent la même mesure à l’infini. Ce n’est pas une élection, c’est un échappatoire. Ce n’est pas une victoire, c’est un pari. Un pari risqué. Car même les masques bien taillés finissent par tomber. Et ce jour-là, le PDCI-RDA devra répondre à une question simple : que vaut un leader dont l’épine dorsale repose sur des raccourcis et son appartenance à groupe ethnique donné ?
Simplice Ongui
Directeur de Publication
Afriqu’Essor Magazine
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