Interrogé sur un éventuel 3e mandat de Alassane Ouattara, qui le nomma, le 25 juillet 2011, à la tête du Conseil constitutionnel en violation de notre Constitution, il donna la réponse suivante: “ Nous en sommes encore au stade des supputations, des hypothèses. Mais le président de la République est un homme majeur, un homme responsable qui sait ou doit savoir ce qu’il doit faire, non pas seulement pour lui-même, mais d’abord pour le pays. Donc, c’est à lui de voir, de juger pour n’avoir à faire que ce qui va dans le sens de l’intérêt de la Côte d’Ivoire, donc de l’intérêt général.” S’exprimer de cette manière n’est rien d’autre que botter en touche, parler pour ne rien dire, se livrer à des acrobaties inutiles là où il suffisait simplement de dire: “Ouattara a le droit ou n’a pas le droit de briguer un 3e mandat”. Une fois de plus, il a mâché ses mots parce qu’il n’a jamais brillé par le courage, parce qu’il a toujours “donné des réponses abstraites pour fuir le réel” comme il l’avoue lui-même dans l’interview accordée au quotidien L’Inter: “Il y a des choses que je voudrais dire, mais que je n’ose pas dire parce que j’ai peur de m’attirer les foudres des dieux du temps des Grecs, peut-être de certains hommes. Il y a des sujets qui sont un peu tabous.” Et pourtant, il est présenté comme un intellectuel; on le dit grand constitutionnaliste; on jure qu’il maîtrise le droit et patati, patata. Non, tout diplômé ne peut être appelé intellectuel. Ne confondons pas les deux mots car il n’y a pas de sujets tabous pour un intellectuel. Celui-ci, plutôt que de rester dans une fausse neutralité, doit prendre position sur toute question qui travaille le peuple car ses prises de position peuvent influencer les comportements ou impacter le quotidien des populations. Je voudrais ensuite rappeler qu’un homme de droit (celui qui a étudié le droit ou qui a une expertise reconnue dans ce domaine) n’est pas forcément un homme droit. Pourquoi? Parce qu’un homme droit n’a pas peur de se prononcer quand le droit est bafoué, quand le premier citoyen censé respecter la loi ne marche pas droit ou veut ruser avec le droit. Le vrai homme de droit dit toujours le droit, marche droit, va droit au but au lieu de recourir à des formules alambiquées; le véritable homme de droit a horreur de la langue de bois, n’adoube pas des putschistes, ni ne s’acoquine avec des criminels juste pour remplir sa panse; il demeure droit dans ses bottes, même lorsque ceux qui veulent tordre le cou au droit le menacent de ceci ou de cela. Les Ivoiriens ne doivent pas se laisser impressionner par des titres ronflants exhibés par des hommes creux. Ce qu’ils doivent considérer, c’est qu’un intellectuel ne vaut avant tout que par le courage de ses opinions. Quiconque refuse de dire ce qu’il pense parce qu’il a peur de la foudre de Ouattara ne mérite ni le respect ni la considération des Ivoiriens.
Jean-Claude DJEREKE