Guy LECOURT transmet le témoin à Edouard HABRANT.
Publié par Sous la Voûte étoilée
Lors de son convent qui vient de se tenir à Montpellier, la Grande Loge Mixte de France retrouve un Grand-Maître qu’elle connait bien, lui qui avait succédé à François Padovani et dont Guy Lecourt avait été le successeur.
Avocat, habile négociateur et franc-maçon d’une grande implication, le nouveau Grand-Maître entame son mandat dans un contexte “sociétal” plus que mouvant avec la mise en cause des principes républicains, liberté absolue de conscience, séparation des églises et de l’Etat, égalité entre les hommes et les femmes, montée des extrêmes droites et leurs cortèges de fondamentalisme, de fanatisme, d’identitaires.
C’est un moment où les convergences obédientielles vont être plus que jamais nécessaires. Où il faudra savoir privilégier ce qui est essentiel dans nos engagements pour que notre voix humaniste soit audible. Il va falloir savoir faire prévaloir nos proximités sur toute autre considération.
Obédience fidèle au modèle libéral adogmatique, la GLMF aborde sans réticence la question sociale et pour autant, sait ne pas s’écarter du cheminement initiatique multirites qu’elle propose à ses frères et à ses soeurs. J’avais eu l’occasion, précédemment, de souligner la grande maîtrise dont ses officiers font preuve.
Voici l’intervention du Grand-Maître :
« L’âne le roi et moi
Nous serons morts demain
L’âne de faim
Le roi d’ennui
Et moi d’amour
Un doigt de craie
Sur l’ardoise des jours
Trace nos noms
Et le vent dans les peupliers
Nous nomme
Âne Roi Homme
Soleil de Chiffon noir
Déjà nos noms sont effacés
Eau fraîche des Herbages
Sable des Sabliers
Rose du Rosier rouge
Chemin des Écoliers
L’âne le roi et moi
Nous serons morts demain
L’âne de faim
Le roi d’ennui
Et moi d’amour
Au mois de mai
La vie est une cerise
La mort est un noyau
L’amour un cerisier. »
(Jacques Prévert, Histoires et d’autres histoires, 1963)
Les premiers jours de ce moi de mai 2018 sont l’occasion de joutes verbales entre les panégyristes de mai 68 et ses contempteurs.
Sans entrer dans ce débat, et sans même chercher à se prononcer sur l’héritage de mai 68, qu’il soit « introuvable » (selon Raymond Aron) ou « impossible » (selon Jean-Pierre Le Goff), il est possible d’en percevoir une trace, une forme d’interpellation, voire de questionnement à travers un slogan paradoxal :
« Assez d’actes, des mots »
Au-delà de la provocation, qui contient sa part d’adolescence, pourquoi ne pas se prêter au jeu et entreprendre un voyage qui, en définitive, nous transportera peut-être dans un autre temps, voire dans un autre espace ?
Un voyage maçonnique, frappé du sceau de cette expérience à la fois intime et collective qu’est l’initiation, creuset des plus belles métamorphoses et des réflexions les plus profondes.
Un voyage en mixité, qui constitue, du point de vue de la Grande Loge Mixte de France, le préalable indispensable à tout véritable changement et à la construction d’une société respectueuse de la dignité de chacun, tant les inégalités hommes-femmes forment le moule inacceptable dans lequel les autres discriminations viennent se couler.
Un cheminement sur la route de la laïcité, qui constitue, selon les mots de Jaurès :
« la distinction nécessaire entre l’ordre religieux, qui ne relève que de la conscience individuelle, et l’ordre social et légal qui est laïque. Voilà pourquoi tout recul et toute somnolence de la République a été une diminution ou une langueur de la laïcité, et tout progrès, tout réveil de la République, un progrès et un réveil de la laïcité. »
Un chemin vers l’avenir, enfin, pour continuer d’espérer, parfois contre tous les signes et toutes les probabilités, et refuser radicalement d’accepter que chacun demeure seul dans sa nuit.
Pour rallumer tous les soleils.
Penser, c’est déjà se préparer à agir.
Edouard HABRANT
Grand Maître de la Grande Loge Mixte de France
Bon mandat au Grand-Maître Edouard Habrant.
Gérard Contremoulin