M. Pierre Soumarey Aly, Auditeur, Ecrivain et Essayiste

La société politique s’enlise dans la médiocrité en ce moment (invectives, menaces, querelles d’héritage politique, de personnes, d’intérêts égoïstes et claniques, projet de revenge, conflit portant sur des promesses, revendication de dettes morales, mésentente sur les règles de la rotation du pouvoir, prétention d’une légitimité historique, querelle de génération ) sans se préoccuper de l’intérêt national (paix sociale, stabilité institutionnelle, développement économique, résolution des problèmes auxquels nous sommes confrontés, investissements) de l’avenir (défis du dérèglement climatique, dividende démographique, recherche et développement, construction d’une capacité technologique, industrialisation, constitution d’une masse critique entrepreneuriale , constitution de nouveaux pôles de développement à l’intérieur du pays, réforme de l’appareil éducationnel, re-allocation de la Main-d’œuvre ). Elle s’arcboute sur ses privilèges, ses haines et ses phobies, ressasse son passé, affiche sa volonté de régler ses comptes à travers des alliances contre-nature, ambitionne de prendre le pouvoir ou de le reconquérir par tous les moyens, la fin justifiant ceux-ci (chienlit, pression émotive, basses manœuvres, intoxication, violence) et exprime des revendications partisanes, sans que les points de friction ou de divergence n’adressent ou ne concernent les préoccupations des populations ou le projet politique conduit par le Gouvernement.

Ainsi, elle crée avec une irresponsabilité déconcertante les conditions d’un risque majeur pour le progrès du pays (régression qualitative du leadership, possibilité d’une nouvelle belligérance, perturbation du cadre macro-économique, ralentissement des investissements et de la dynamique. Elle n’hésite pas à contrarier l’élan de notre pays qui cherche à atteindre le plus tôt possible, un pallier d’irréversibilité à son développement, uniquement pour satisfaire son appétit de pouvoir et d’avantages. Pendant ce temps, elle ne propose aucune une offre politique alternative et sérieuse (projet de société, programme d’action, vision à long terme) qui puisse infléchir ou corriger le modèle actuel vers plus de progrès social, de développement endogène, de justice sociale et de démocratie. Rien de tout ceci ne l’intéresse réellement. Ce qui l’intéresse c’est le pouvoir. Mais le pouvoir pour quoi faire ? Ce qui l’intéresse, c’est l’individu qui doit le détenir, en dehors de tout critère de compétence, de vision, de programme, d’expérience, etc., pourvu qu’il soit de notre camp politique ou de notre appartenance culturelle. C’est vraiment consternant. Ça l’est davantage encore, quand on pense que des gens hypothèquent leur avenir et leur vie, pour des individus de cette trempe, dont la vacuité politique devrait pourtant les interpeller.

CONCLUSION

L’Ivoirien doit absolument se guérir de ses passions, de son émotivité, de sa haine de l’autre, son concitoyen et frère, de sa violence, de la critique facile et mal informée, du populisme, du tribalisme, du clanisme, de la corruption, de la mauvaise foi politique, de la séduction, de la facilité, de l’impunité. Du populisme, de l’égoïsme de sa classe politique, de la politisation de son armée, de l’enrichissement par des activités politiques, etc. Il doit combattre ces maux, avant que ceux-ci ne le détruisent. Il doit combattre la confiscation du capital et du pouvoir par une bourgeoisie politique artificielle et des lignées de famille qui pensent que le pays leur appartient. Il doit combattre la prétention d’un groupe politique ou ethnique à vouloir le pouvoir, parce qu’il pense que celui-ci lui appartient de droit ou historiquement. Il doit combattre le plus grand danger qui pèse aujourd’hui sur son avenir : l’aventure politique et son lot de conséquences régressives, qui pourraient faire resurgir nos vieux démons.

Pierre Soumarey Aly