(L’Éléphant Déchaîné, 24 – 27 mai 2013) – Kouadio Konan Bertin dit «KKB», député et président des jeunes du Pdci, qui annonce innocemment un « candidat déjà connu » du Pdci contre le président-déjà-candidat pour 2015, Alassane Ouattara.
Djédjé Mady, le secrétaire général du parti qui se rebelle pour avoir été dessaisi de l’organisation du futur congrès ordinaire, et qui refuse l’honneur qui lui est fait d’être avec Bédié, les deux superviseurs de ce congrès.
Bédié lui-même qui manœuvre depuis des mois à coups de modifications des conditions d’éligibilité à la présidence du parti pour être le seul candidat à ce congrès (relire « L’Eléphant », N°152 du 7 mai 2013).
Niamien N’Goran, président du Comité ad hoc de réflexion du Congrès du PDCI qui prépare tranquillement, son accession au poste de secrétaire général du parti et qui dans la foulée négocierait sous les eaux avec le champion du RDR pour un deal « neutralisateur » des velléités de candidatures à la présidentielle de 2015 au PDCI.
La base et de nombreux cadres qui ne comprennent plus rien dans la politique menée par la direction et qui dénoncent un « pilotage à vue ».
Tout ça, à quelques mois d’un 12ème Congrès Ordinaire qui se voulait une « fête du rassemblement », mais qui, au regard de l’évolution de la situation, s’annonce plutôt explosive…
LA DIRECTION, VIOLATEUR MASSIF DES TEXTES DU PDCI
Difficile de chiffrer le nombre de textes régissant le fonctionnement du vieux parti qui ont été proprement piétinés par la haute direction depuis le 11ème congrès.
Mais les violations les plus retentissantes sont sans doute celles qui créent en ce moment une atmosphère électrique au sein du parti. Il s’agit de l’abrogation des textes régissant les conditions d’éligibilité à la présidence du parti et de la violation des textes régissant les organes chargés de l’organisation du congrès.
En grand démocrate, le président Bédié, lors du 11ème congrès (5 au 7 avril 2002), a veillé à ce que soit gravé dans le marbre, l’âge limite au-delà duquel, aucun cadre ne peut prétendre diriger le parti.
Alors jeune de seulement 68 ans, il avait sagement fixé l’âge limite de candidature à 75 ans. Onze ans plus tard, ce solide jeune homme de 79 ans ne veut plus entendre parler de limitation d’âge au PDCI. Et il a mis tous les moyens en œuvre pour que cette regrettable résolution du 11ème congrès disparaisse des statuts du parti.
Pour ce faire, il a créé un curieux Comité ad hoc dont la direction a été confiée à Niamien N’Goran, (fidèle neveu mais qui de plus en plus pense à son propre avenir), afin de réfléchir sur les conditions d’organisation du 12ème congrès.
A la fin de leurs cogitations de plusieurs mois, les membres de ce Comité ont accouché des résolutions parfaitement fructueuses pour le candidat Bédié. De façon totalement désintéressée, ils ont décidé de ne plus contrarier l’avenir des jeunes cadres du parti par une histoire de limitation d’âge. « Nous estimons que l’on ne doit pas coller ces conditions (d’éligibilité à la présidence du PDCI, NDLR) à celles du président de la République. On ne peut pas, compte tenu de l’âge, être éligible à la présidence de la République. Mais, on peut être président du parti. Nous avons donc proposé qu’il faille dissocier les deux choses. C’est au 11è congrès que cela a été introduit. Nous estimons qu’il faut revenir à la situation antérieure.» A déclaré Niamien N’Goran, dans les colonnes du portevoix officiel du PDCI, «Le Nouveau Réveil», 4/5.
Ne sont-ils pas en train de tailler des textes à la mesure de Bédié ? Mais non, quelle idée !
Réécoutons Niamien N’Goran : «Non, non, ce n’est pas du tout le cas. On peut avoir d’autres personnes qui peuvent se retrouver dans la même situation. Je ne citerai pas le président Houphouët- Boigny. C’est au 11è congrès que cette disposition a été introduite. Nous pensons que ce n’est pas démocratique. Je peux être âgé et apporter mon expérience au parti…» Et comment le 12ème congrès va-t-il s’organiser ? « Il appartiendra au président du Parti d’en décider », avait-il répondu. Djédjé Mady a dû apprécier.
DJEDJE MADY VERS LA PORTE DE SORTIE
S’il n’a pas bronché lorsque Bédié a créé son comité de réflexion sur le 12ème congrès, l’encore secrétaire général, Djédjé Mady, vient de refuser d’avaler une autre couleuvre à lui servie par Bédié, quelque peu induit en erreur par son neveu.
Et, c’est sur la place publique que Djédjé Mady s’est lamenté, au cours d’une rencontre organisée le mardi 21 mai, à la maison du parti à Cocody, et à laquelle ont assisté, selon « Le Nouveau Réveil », les vice-présidents Gaston Ouassenan Koné, Yaya Ouattara, Aka Aouélé et Emile Constant Bombet : « Conformément aux textes du parti, on m’avait demandé de préparer le Congrès…» A-t-il commencé. «On», qui «on» ? Il n’ose plus nommer Bédié ?
Mais laissons-le continuer : «Et pendant que j’étais en train de le faire, puisque je vous ai tous rencontrés (parlant des instances du parti), je reçois une note avec un comité d’organisation du Congrès de 297 membres avec plusieurs commissions. Et comme superviseur général, le président Henri Konan Bédié et moi, en tant que superviseur délégué, et un coordonnateur. Je suis donc venu demander conseil. Que pensez-vous de cela ? Quelle attitude adopter face à cela ? »
Après quelques interventions, toujours selon « Le Nouveau Réveil », Djédjé Mady a repris la parole pour asséner : «Il ne s’agit pas d’un problème de personnes. Au Pdci, on veut faire croire qu’il y a des gens qui aiment Bédié et d’autres qui suivent Djédjé Mady…» La vraie formule, ce n’était pas plutôt «on veut faire croire qu’il y a des gens qui aiment plus Bédié que d’autres ?» Niamien N’Goran a dû adorer cette subtilité. Mais laissons parler Djédjé Mady : «Qui, plus que moi, aime Bédié ? Moi qui, durant 11 ans, travaille à ses côtés. Et je mets quiconque au défi de prouver que j’ai une fois trahi Bédié. Le parti, heureusement, est l’affaire de tous. Le président et le secrétaire général ne peuvent être forts et mener à bon port le parti qu’avec votre soutien. Nous sommes tous concernés par l’avenir du parti.»
Traduction, il n’y a pas des gens plus préoccupés que d’autres, par l’avenir du PDCI. Transmis au concerné qui manœuvre pour que Djédjé Mady soit relégué au rang d’observateur dans l’organisation du Congrès.
Mais, l’encore secrétaire général (plus pour longtemps), refuse désormais d’avaler ces dernières couleuvres : « C’est le secrétaire général qui organise le Congrès. Le président nomme le président du Congrès et les secrétaires de séance dont le mandat prend fin à la clôture du congrès (…) tout ce que je demande, c’est le respect des statuts. Je ne demande rien d’autre. Mais qu’on fasse en sorte que le PDCI soit fort en respectant un minimum d’équité, de justice et de respect pour les autres. Quand on a avalé plusieurs couleuvres, un moment donné, il y a des couleuvres qui ne passent pas… »
C’est le secrétaire général qui organise le Congrès et le secrétaire général s’appelle Djédjé Mady. Et comme le président du parti a nommé Djédjé Mady superviseur délégué du Congrès, devinez qui va organiser le congrès ! Au PDCI nouveau, les textes sont faits pour ne pas être respectés ?
UN NOUVEAU S.G. ET PAS DE CANDIDATURE DU PDCI
Tous les faits dénoncés par Djédjé Mady sont le fruit des réflexions des membres du Comité ad hoc créé par Bédié et présidé par Niamien N’Goran, pour réfléchir sur les conditions d’organisation du Congrès. Et c’est ce comité qui a décidé d’écarter le secrétariat général de l’organisation du Congrès. Décision entérinée par Bédié.
Et tout ça pour quoi ? Eh bien pour verrouiller d’abord le Congrès et mettre hors d’état de nuire, tous les cadres qui ne veulent plus attendre sur le banc de touche et qui entendent affronter Bédié dans une élection ouverte. Alors que selon le ministre Adjoumani, « seul Bédié peut sauver le PDCI, actuellement ».
Et ensuite, écarter Djédjé Mady, jugé « peu sûr », de la tête du secrétariat général, afin qu’il ne contrarie pas les plans de Niamien N’Goran. Lequel, selon une information confidentielle obtenue par « L’Eléphant », aurait rencontré récemment et secrètement le chef de l’Etat. Au menu de leurs échanges, cette lancinante question : Comment faire pour que le PDCI n’investisse pas de candidat pour la présidentielle de 2015 ?
Réponse : Niamien N’Goran renoncerait à se porter candidat du PDCI en 2015, contre le Chef de l’Etat. En contrepartie, il obtiendrait les moyens et les soutiens nécessaires pour récupérer le secrétariat général du parti, dans un premier temps, puis, plus tard, succéder à Bédié.
Subitement, on comprend mieux pourquoi « Le Patriote », porte-voix officiel du RDR, après avoir traité le PDCI « d’éternel perdant », s’en prend désormais à tous ceux qui osent parler de candidatures du PDCI en 2015 ou qui entendent contrarier la détermination de Bédié de succéder à lui-même, à la tête du vieux parti.
ALEX KASSY