Ses révélations sur le président Bédié
Décédé le dimanche 26 avril 2015 à la Polyclinique Hôtel Dieu à Treichville, à l’âge de 79 ans, des suites d’une longue maladie, le Most supérieur évangéliste Zagadou Akéblé Louis sera inhumé ce samedi 6 juin à Gagnoa, plus précisément dans son village natal à Digbeugnoa. En attendant cet événement, retour sur une vie pleine de symboles, qu’il a lui-même contée dans ses mémoires, intitulés ”Mémoires, témoignages d’une vie”. Un document-testament de près de 200 pages, qu’il s’apprêtait à faire paraître.
L orsqu’on évoque le nom de Zagadou Akéblé Louis, on pense tout de suite à ses fonctions et à ses responsabilités au sein de la grande famille de l’église du christianisme céleste. Des événements ponctuels. Des exploits. Mais, Zagadou Akéblé Louis n’était pas que ça. Né le 2 août 1936 à Pidehio, village devenu aujourd’hui Digbeugnoa, dans la sous-préfecture de Gagnoa, fils de Zagadou Naki (chef traditionnel) et de Goufahon Assia, le petit Akéblé a connu un cursus scolaire ”mielleux” assorti de plusieurs diplômes universitaires. C’est aux côtés de son grand frère, l’ancien président de l’Assemblée territoriale, Zagadou Djédjé Capri, deuxième personnalité du territoire après le gouverneur de la Colonie, que Akéblé Louis fit ses premiers pas dans le scolaire en novembre 1945. «Il a peaufiné ma formation d’homme. Aussi, il a beaucoup marqué ma vie. Et tout ça, je m’en souviens comme si c’était hier. Que Dieu l’en bénisse abondamment au Nom de Jésus Christ», écrit-il dans ”Mémoires, témoignages d’une vie”, parlant de ”l’homme qui a marqué sa vie”. Avec la bénédiction de son père avant sa mort, Zagadou Louis, au lieu de six ans comme cela se faisait dans le temps, a mis quatre années pour boucler son cycle primaire. Le directeur de l’école l’ayant autorisé à sauter les classes des cours élémentaires première et deuxième année. «Je remercie aujourd’hui le Bon Dieu de m’avoir toujours béni dans ce sens depuis lors. Depuis mon cycle primaire jusqu’à la fin de mes études, quand j’étais mal classé, j’occupais le rang de 2ème ou 3ème. Sinon, je me retrouvais toujours en tête de peloton dans mes classes parcourues», témoignet-il.
Les postes de responsabilités occupés
Après des études bien remplies, sanctionnées par plusieurs diplômes dont le Diplôme d’études supérieures en sciences économiques et commerciales (Dessec) à l’Université de Dakar au Sénégal et le Diplôme de l’institut d’administration d’entreprise (Diae) à l’Université Aix-en-Provence à Marseille en France, il décroche son premier emploi à Shell à l’issue d’un test. «Après l’audition, il a été demandé à chacun d’entre nous de retourner chez soi et d’attendre la réponse par correspondance. Une semaine après l’entretien à Shell, je reçois une lettre qui m’invite à me présenter le plus tôt possible au service du recrutement. Aussitôt, je m’y suis rendu et la bonne nouvelle tombe: je suis retenu de tous les auditionnés, donc embauché et nommé Administrateur général de la société Shell de l’Afrique occidentale (Ssao) avec résidence à Abidjan. A ce poste, je devais, pour le compte de Shell, couvrir tout le territoire de l’Afrique occidentale française. Je remplaçais à ce poste, M. Crichet, un expatrié français qui retournait à la maison-mère à Paris. Une fois sur place, la société a mis à ma disposition une villa à l’Européenne, un chauffeur avec livrée, une Peugeot 403 comme véhicule de fonction. Bref! Tout ce que pouvait recevoir un cadre digne de ce nom et de ce rang», note-t-il. Après Shell, sa carrière professionnelle fut marquée par des passages à l’Energie électrique de Côte d’Ivoire comme directeur commercial (1965 – 1968). De 1968 à 1972, son troisième emploi a été Directeur de l’Administration centrale de la Banque africaine de développement (Bad). Fait marquant dans cette étape de sa vie professionnelle, c’est lui qui a obtenu le terrain en plein centre du Plateau afin d’y bâtir le siège social de la Bad, qui vient de fêter son cinquantenaire. «Avec un esprit créatif et innovant, j’ai usé de mes relations en approchant le ministre des Finances d’alors qui n’était autre que Henri Konan Bédié, ancien président de la République de Côte d’Ivoire, qui depuis lors était déjà non seulement un ami personnel pour moi, mais aussi un plus-que-frère. C’est donc lui que je suis allé voir pour obtenir un terrain en plein centre du Plateau afin d’y bâtir le siège social de la Bad. Il a été demandé à la Bad de payer quarante millions de francs Cfa en compensation à la Caisse de Compensation et de Prestations familiales, ancien propriétaire des lieux. C’est ainsi que le terrain où se trouve l’actuel siège social est revenu à la Bad», raconte Zagadou, qui a également servi au Port autonome d’Abidjan et au Groupe Wrangler / Ucodi / Cotivo. Pour lui, l’argent n’a de valeur que dans la mesure où ça peut aider les autres; et cette façon de voir, il la tient de son ami et ”plus-que-frère”, l’ancien chef de l’Etat, le président Henri Konan Bédié, qui lui a enseigné la générosité désintéressée à travers les rapports amicaux qu’ils ont toujours entretenus. Sa dernière fonction officielle fut celle de Commissaire priseur près de Cour d’Appel d’Abidjan en 1984. «Jusqu’à ce que je devienne Commissaire priseur, c’est mon ami, l’ancien président Henri Konan Bédié, qui m’a toujours soutenu en m’apportant chaque fois le coup de pouce nécessaire. Qu’il veuille bien souffrir que je lui sois ouvertement et très sincèrement reconnaissant à travers cet ouvrage, pour tout ce qu’il a fait et continue de faire pour moi jusqu’aujourd’hui», at-il écrit. Il faut le dire tout net, le parcours du natif de Digbeugnoa était teinté de politique. Son appartenance au Pdci-Rda s’est fait ressentir depuis 1965 avec son implication active dans la création de la première section de Cocody, en compagnie de ses amis: Amichia René, Gomis Charles, Abou Doumbia, Kadjo Ehoué, et bien d’autres encore. En 1975, il fut député de Cocody. Son passage à l’hémicycle a duré cinq ans (du 1er janvier 1976 au 31 décembre 1980). Sur le plan sportif, Zagadou était un féru du ballon rond au point d’occuper la fonction de Secrétaire général de l’équipe de Africa sports d’Abidjan devenue aujourd’hui Africa sports national. Il remporta, en 1967, avec les Aiglons, le sacre national de champion de Côte d’Ivoire avec 24 matchs et 24 victoires, un record national jusque-là jamais égalé…
Sa rencontre avec Dieu
Si Zagadou est connu pour son appartenance à l’église du Christianisme céleste, c’est à l’église catholique qu’il entama sa vie religieuse, et où il reçut son premier baptême à Gagnoa en 1948. C’est 21 ans plus tard, c’est-à-dire en 1969 qu’il fait sa conversion à l’église du christianisme céleste. Un an plus tard, en 1970, il est Re-baptisé à l’Eglise du Christianisme céleste par le Prophète Pasteur Samuel Biléou Joseph Oschoffa, luimême, fondateur de cette église. Dans son œuvre, il raconte son premier contact avec l’église du christianisme céleste: «Dieu m’a atteint par mon chauffeur», explique-t-il. Selon lui, cette rencontre s’est déroulée à Porto-Novo, au Bénin, sur l’esplanade de la résidence de Oschoffa précisément vers 17 H, lorsqu’un homme impressionnant de 2m de taille, apparaît du haut de son balcon, comme le Pape le fait à Rome à chaque fois qu’il sort pour faire la cérémonie Urbi Orbi pour prier pour les gens. Quand il a fini de prier pour nous qui étions là, ce jour, raconte Zagadou, il est désigné du doigt en même temps qu’un certain nombre de personnes. «Arrivé devant lui, dans son salon, le Prophète Oschoffa me dit: A genoux! Je me suis mis à genoux. Il me dit ensuite:” dé- chaussez-vous!”. Je me suis dé- chaussé, et enfin il me dit: ”touche ma soutane!”. Ce que j’ai fait. Aussitôt, il s’est mis à regarder fixement la croix de Jésus-Christ qui était accrochée juste devant lui. Il a regardé la croix pendant longtemps. Après, il me dit: ”Mon fils bien aimé” – c’est comme cela qu’il m’a appelé jusqu’à sa mort en 1985 – ”mon Dieu me dit de vous dire qu’il a déjà fait un plan de vie pour vous. Si quelqu’un vient vous dire qu’il peut faire quelque chose pour vous pour que vous soyez quelqu’un, ceci est archifaux! Mon Dieu me dit de vous dire qu’en 1975, vous allez ridiculiser vos amis dans la compétition politique où vous êtes depuis longtemps, mais qu’après ce mandat, vous allez commencer à vous occuper de mon Eglise», rapporte-t-il. De retour à Abidjan, il a rejoint la Communauté des frères chrétiens céleste qui étaient basée sur une paroisse de l’époque appelée Trinité, actuel site occupé par la base de l’armée française à Abidjan. C’est en 1975, quand le Prophète Pasteur Oschoffa a eu l’occasion de visiter la Côte d’Ivoire, qu’il s’est fait baptiser par lui à l’actuel site du camp commando de Koumassi.
Première onction dans l’église
Toujours en 1975, précisément au mois de décembre, après le voyage du Prophète en Côte d’Ivoire, il s’est rendu à nouveau auprès de lui, comme cela lui a été révélé. C’est suite à ce voyage qu’il a reçu sa première onction d’assistant-leader le matin en même temps que son frère en Christ Ediémou Blin Jacob qui lui, écrit–il, venait d’arriver dans l’Eglise avec son cousin feu Amichia Pierre. Ils n’étaient que 3 Ivoiriens, et tous ont reçu ce même grade d’Assistant-leader comme première onction. Après avoir été assistant-leader le matin, il a reçu un autre grade qui se prend normalement trois ans après au moins. C’est comme cela qu’il a pu être le premier cadre de l’Eglise du Christianisme céleste en Côte d’Ivoire. Le Révérend Most Supérieur Evangéliste Zagadou Akéblé Louis, Prêtre de haut rang dans l’Eglise du Christianisme céleste, occupait avant sa mort les hautes fonctions de chef des Diocèses francophones d’Afrique et d’Outre-mer. Il était la troisième personnalité mondiale de l’Eglise du Christianisme Céleste dirigée par le Pasteur mondial Emmanuel Oshoffa du Nigeria. Jusqu’à sa mort, l’homme, à qui les fidèles ont donné le surnom de ”Papa Zag”, a vu et a pratiqué tous les Pasteurs qui se sont succédé à la tête de cette Eglise qui s’apprête à lui dire adieu.
Cyrille DJEDJED
Source : L’Inter N°5094 du Vendredi 05 Juin 2015